vendredi 1 mai 2009

UDC36 partie III - preview

D'ici demain... un petit avant-goût, comme d'habitude.
Thétis ne voyait plus rien, n’entendait plus rien et ne ressentait plus rien. Ou du moins rien qui n’ait le moindre rapport avec des sensations purement humaines. Mais son esprit, lequel avait supplanté la conscience de son enveloppe charnelle, regardait, horrifié et impuissant, la sphère monumentale et aveuglante qui se ruait sur elle à une vitesse incompréhensible. Elle se savait pourtant déjà au cœur de l’explosion imminente, à l’instar de ses compagnons. Mais l’impression était tenace : cela fonçait vers elle, à la fois à toute allure et à une lenteur suffisante pour qu’elle commence à réaliser ce qui l’attendait. Et ce que ça attendait d’elle. Mutable…
Rien ne serait achevé tant que la concentration ainsi générée de leurs énergies et de leurs âmes ne ferait pas l’objet d’un dernier coup de pouce. Celui qui les unirait à jamais – à jamais… - en une seule et même entité indivisible. L’unité élémentaire. Le rien qui avait donné naissance au tout. Ce même rien que les Portes s’évertuait à ériger en vérité absolue, en unique solution définitive. Le retour aux sources. La dissolution dans le néant. Et la renaissance de l’équilibre originel. Thétis portait en elle cette connaissance depuis toujours mais celle-ci ne se révélait à elle qu’en cet instant, celui où sa nature profonde et son héritage séculaire allaient prendre le relais. En elle cohabitaient les deux seuls choix possibles : celui du monde ou celui des hommes. Et du premier découlait ce que nul n’avait encore envisagé jusqu’ici. Ils pouvaient être eux-mêmes à l’origine de leur propre destruction et de celle de l’humanité. Cette puissance… une telle puissance, miroir parfait de ce dont la naissance du monde était issue, était l’exact pendant des Portes. A tel point que Celles-ci ne lui étaient pas étrangères. C’était tout l’inverse. Et Thétis, tout comme ses compagnons, mais sans doute bien plus qu’eux en cette seconde, portait en elle une parcelle de cette dualité. Et de ce qu’elle allait en faire dépendrait leur avenir à tous, un avenir qu’ils ne pouvaient concevoir que dans un monde qui demeurerait le leur.
Il lui fallait être forte. La moindre faiblesse, le moindre écart et elle ne changerait pas les choses. Elle ne modifierait rien. La concentration fantastique de leurs cosmos demeurerait alors vide de sens, vide de leurs espoirs, de leur humanité, de tout ce qui faisait qu’ils étaient sur le point de sacrifier leurs vies.
Ce qu’elle avait accumulé au cours de son encore trop courte existence, les rêves et les cauchemars des uns, les amours et les haines des autres, ses propres peines et ses propres joies, sa connaissance la plus intime de chacun de ses camarades et d’elle-même, se déversa dans son aura aux reflets de plus en plus bleutés avant d’aller se fondre dans la sphère sans limites qui s’apprêtait à l’englober. Ses bras tendus s’étaient écartés tandis qu’elle offrait à tous ses convictions et son espérance. Ses yeux s’étaient fermés. Elle lui donnerait vie. La leur. Celle qui résultait de leurs existences à tous, celle qui s’était nourrie de ce que chacun était au fond de lui-même. Elle n’était pas parfaite songeait-elle sans en prendre conscience, alors que la lumière aveuglante, tant dans la réalité que dans le surmonde où la jeune femme se considérait, se muait en une teinte de nouveau dorée, animée de volutes paresseuses mais chatoyantes s’entremêlant avec une grâce qui lui fit oublier un instant la brûlure intense qui parcourait ses nerfs, qui enflait dans son ventre. Mais elle existait. Et elle leur appartenait. Un sourire naquit sur ses lèvres lorsqu’elle fut certaine que rien ne pouvait plus interférer avec cette plénitude. Toute particule de néant avait disparu, la dualité n’avait plus cours. Juste cette existence formidable qui unissait en une seule pulsation l’ensemble de leurs cœurs qui battaient à l’unisson. Elle avait réussi.

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